Cette mosaïque romaine mise au jour lors des fouilles effectuées par l'INRAP sur le boulevard Jean Jaurès en 2007, à Nîmes, est un document tout à fait exceptionnel du point de vue de son état de conservation et de la qualité de son décor, cette mosaïque constituait le sol d'une pièce de 35 m² appartenant à une luxueuse demeure de l'agglomération romaine.

Son iconographie relève à l'évidence du cycle dionysiaque ou bachique (présence de ménades, de masques de théâtre) même si le thème mythologique du panneau central se révèle assez difficile à identifier : s'agit-il de Dionysos-Bacchus combattant le géant Eurytos ou bien Penthée tué par sa mère Agavé à l'instigation de Dionysos ? Les deux hypothèses ont été avancées par les spécialistes.

Le mot "mosaïque", créé au 1er siècle avant J.C. à Rome (musivim opus) dérive du mot grec Movoa, qui qui signifie "muse". La mosaïque doit peut-être son nom au fait que la technique particulière qu'elle met en oeuvre fut d'abord utilisée pour décorer, dans les jardins romains, des fontaines, des nymphées et des grottes, lieux traditionnellement associés aux muses. dans l'Antiquité, on a utilisé la mosaïque comme pavement, comme revêtement mural ou comme décor de voute. Les premières mosaïques apparaissnt en Asie Mineure au VIII è siècle avant J.C. En Grèce, à l'époque classique ( Vè siècle avant J.C.), se développe la technique de la mosaïque de galets qui produira des pavements de très grande qualité à Pella en Macédoine, mais qui se rapproche parfois du simple cailloutis et offre une gamme de coloris assez limitée.

A la fin du IVè ou au début du IIIè siècle avant J.C., l'invention de la mosaïque de tesselles, constituée de petits cubes taillés en série enfoncés dans un lit mortier, représente une véritable révolution, permettant de savantes combinaison polychromes capables de rivaliser avec la peinture. Le dessin préparatoire se faisait sur le nucleus encore frais. Ainsi, trouve t'on parfois, des traces de cordelettes correspondants au contour du tapis central. Parfois apparaissent aussi des traces de pigments. Les tesselles étaient probablement débités sur place, à l'aide d'un tranchet, d'une martelline (marteau à tranche acérée) et d'une taillote (petit établi à partie saillante). les matériaux employés sont des calcaires (blanc, gris, noir, ocre), des pâtes de verres opaques (vert, bleu) et des terres cuites (orange). la pose des tesselles a dû débuter par le contour des cadres et des tresses déterminant la trame. L'exécution de la mosaïque précède la réalisation des peintures murales qui s'appuient dessus. Certaines figures de la mosaïque qui nous concerne, endommagées, ont dû être refaite après un laps de temps indéterminé. Des traces de feu postérieures à ces réfections, maladroites mais fidèles, suggèrent que l'occupation s'est poursuivie encore quelques temps. la maison est cependant abandonnée au IIIè siècle après J.C.

Cette mosaïque, presque complète, mesure 35m². Au travers de la technique et des matériaux mis en peuvre, on a pu juger du soin apporté à sa réalisation. Un remblai de nivellement supportait un radier de cailloux (stratumen), sur quoi a été coulée une première chape de béton (rudus), puis un mortier de chaux et de débris de terre cuite (nucleus). La première phase du travail de restauration a permis d'observer des traces de taloche utilisée pour étendre ces bétons, et même l'empreinte d'une semelle cloutée. Formant la surface du sol (opus tessellatum), les tesselles, de 3 à 15 mm de côté en moyenne, étaient fixées grâce à un lait de chaux. On rencontre, en général, deux types de mosaïques, selon le modèle des tesselles employées :

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Les textes ainsi que le plan, proviennent de l'exposition temporaire lors de la restauration qui s'est déroulée dans la Chapelle des Jésuites de Nîmes au début de l'année 2008.

Jean-Pierre Darmon, CNRS, et Jean-Yves Breuil, INRAP, à propos de l’interprétation de la mosaïque :

Raymond Rogliano, restaurateur : video sur la restauration